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Ethel Smyth et Rebecca Clarke : deux grandes dames au Festival Rosa Bonheur

Dernière mise à jour : 19 août 2021


13 septembre 2020

Château Rosa Bonheur


Geneviève Laurenceau - violon

Natacha Colmez - violoncelle

Camille Belin - piano



Nouveauté de l’été 2020, le Festival Rosa Bonheur entend bien donner aux “Musiques de femmes” leurs lettres de noblesse. L'expression désignait une musique sucrée destinée aux salons bien-pensants ? On montrera ici la richesse des expressions et la multiplicité des talents des compositrices.


Après un parcours dans l’écriture pour quatuor à cordes, deux jours plus tôt, le festival a donc choisi de s’attaquer à deux monuments de la musique britannique, Ethel Smyth et Rebecca Clarke - la première célèbre pour son engagement féministe, la seconde pour les préjugés dont elle fut victime lors d’un concours de composition.


Les œuvres de jeunesse d’Ethel Smyth, dont la Sonate pour violoncelle et piano en la mineur est un bon exemple, illustrent l’influence sur son écriture de la musique allemande. Un romantisme assez agité, presque fiévreux, anime le premier mouvement ; le deuxième mouvement répond par un thème très doux, d’une vraie mélancolie, avant un finale marqué “vivace e grazioso”, plus théâtral. Bien qu’un peu assourdi par l’acoustique (le concert a lieu en plein air) le violoncelle de Natacha Colmez s’efforce de mettre en relief ces changements de caractère, accentuant le caractère sentimental des longues phrases chantées face à la solennité des passages plus sombres. Le piano très doux de Camille Belin souligne les harmonies parfois originales de l’“Adagio”, les dialogues des deux instruments l’espièglerie de l’“Allegro”.


Geneviève Laurenceau choisit d’accentuer davantage le caractère fiévreux de la Sonate pour violon et piano. Son vibrato, toujours très présent, parvient à rendre avec justesse l’empressement, voire l’inquiétude qui point dans l’écriture. Le son a beau saturer légèrement dans les aigus, elle dessine une échelle de nuances assez ample et souligne le dialogue avec le piano - plus complexe que dans la Sonate pour violoncelle. Si les premier et troisième mouvements évoquent par instant des chansons populaires, voire présentent un caractère quasi-improvisé, le langage du deuxième mouvement est plus moderne, plus décousu aussi. Sous les doigts de Laurenceau, le final prend un aspect percussif et s’aventure résolument du côté de cette modernité, avec une accentuation à outrance des contrastes (aux passages rêveurs dans l’aigu s’oppose une vraie rage dans les graves).


La Dumka de Clarke, ici adaptée pour violon, violoncelle et piano (la partition originale comprenant un alto en lieu et place du violoncelle) a un point commun avec l'œuvre de Smyth : ses références évidentes à la musique folklorique. Le caractère dansant qu’indique le titre se retrouve dans l’écriture rythmée, parfois chaloupée de la pièce, dont les passages ternaires évoquent des pas de valse. La juxtaposition de caractères différents, parfois presque sans transition, est soulignée par les musiciennes qui choisissent régulièrement de jouer sans vibrato.


Un caractère volubile vite dissipé par l’Hymne des femmes de Smyth, qui conclut ce concert : chant de ralliement des suffragettes britanniques, il rappelle que le combat féministe pour la reconnaissance des compositrices est loin d’être terminé. Le Festival Rosa Bonheur aura permis un pas de plus vers l’égalité !



Clara Leonardi




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