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  • ComposHer

Lumière sur les compositrices romantiques françaises - 6/8

Dernière mise à jour : 6 avr. 2023

Mars 2023

« Compositrices », Bru Zane Label


« Après avoir écouté ces dix heures de musique, il ne sera plus possible d’évacuer les compositrices du champ de la programmation de concerts sous prétexte d’absence d’ouvrages valables ou consistants. »

(Alexandre Dratwicki, Palazzetto Bru Zane)


En 8 disques, 21 compositrices et plus de 160 pièces, l'ambition de ce coffret discographique publié par le Palazzetto Bru Zane – Centre de musique romantique française est donc de favoriser une redécouverte massive du répertoire des compositrices romantiques françaises. Pour saluer ce projet dont l'ampleur est à la mesure de la richesse de cette musique, ComposHer publiera tout au long du mois de mars des comptes-rendus de chacun des disques.

Bru Zane Label

Disque #6

Nadia Boulanger La Sirène (1908, texte d’Eugène Adenis et Gustave Desveaux-Vérité) Orchestre national du Capitole ; Leo Hussain, direction ; Anaïs Constans, soprano ; Aude Extrémo, mezzo-soprano ; François Rougier, ténor Marie Jaëll

Voix du printemps (1885) Sur la grande route - Dans le sentier - L’orage - Idylle - Nuit de mai - Plein jour

Roberto Prosseda et Alessandra Ammara, piano Mel Bonis

Ophélie (sans date, vers 1909) Desdémona (1913)

Omphale (1910) Phœbé (1909) Viviane (1909) Mélisande (1922) Salomé (1909)

Marie Vermeulin, piano Lili Boulanger

Nocturne (1911) Cortège (1914)

Anna Egholm, violon ; Frank Braley, piano Mel Bonis

Six Pièces à quatre mains (dont deux très faciles) (1930) : Caravane - Andante religioso - Carillon de fête - À matines - Habanera - Minuit sonne à la grosse horloge

Roberto Prosseda et Alessandra Ammara, piano


Le sixième disque de ce coffret s’ouvre sur la Cantate La Sirène de Nadia Boulanger. C’est pour le concours du Prix de Rome que Nadia Boulanger compose « La Sirène » sur un poème de Eugène Adenis et Gustave Desvaux-Vérité. Cette œuvre respecte toutes les étapes d’une histoire orchestrée : une jeune fille (Anaïs Constans) supplie la Sirène (Aude Extrémo) de lui rendre son fiancé (François Rougier), emporté par la mer. En échange de sa vie, désespérée, elle promet de le rendre à la Sirène dès qu’elle l’appellera. Sauvé, le marin promet de se tenir éloigné de la mer à jamais… mais il ne saura résister à l’appel de l’océan et de la Sirène. Dans cette histoire, la mer, c’est l’orchestre : tantôt enragé, tantôt calme et lumineux, l’Orchestre national du Capitole de Toulouse fait ressortir toute la densité de l’écriture de Nadia Boulanger, mais aussi toutes ses subtilités. Les idées foisonnent et les vagues de son s’enchaînent sans laisser de répit, portant des solistes particulièrement convaincants et touchants.

Le disque se poursuit avec Marie Jaëll, pianiste de formation, proche de Liszt. Elle publie notamment une méthode basée sur la mémorisation des empreintes digitales des enchaînements possibles au piano. Ces 6 courtes pièces pour 4 mains composées en 1885 nous permettent de nous évader, mais surtout de montrer une synchronisation irréprochable entre les deux pianistes : Roberto Prosseda et Alessandra Ammara. Le recueil Les voix du printemps regroupe tous les épisodes d’une balade musicale: Sur la grande route, dans le sentier, l’orage, idylle, nuit de mai, plein jour; de quoi faire travailler notre imagination.


S’il y a bien une compositrice qui met en avant des « destins extraordinaires » de femmes, c’est Mel Bonis. Née en 1858, elle composa ces sept pièces (sur 9) pour piano entre 1909 et 1913. Ces pièces aux noms féminins, nous permettent de découvrir plusieurs personnalités. On découvre une « Omphale » espiègle avec des notes rapides telles des trémolos, une « Ophélie », plus féérique, que la compositrice a illustré par des arpèges ascendants dans l’aigü du piano. « Viviane » vous baladera avec sa ritournelle, et quant à « Phoebé », elle vous troublera avec ses doubles croches incessantes qui laissent passer une mélodie flirtant entre la lumière et l’obscurité. Pour finir, « Salomé » ménage le suspens, avec l’utilisation de rythmes lents et graves à la main gauche pendant les trois quarts du morceau, puis une accélération du tempo pour retomber et nous laisser dans le doute, jusqu’à l’accord final. Ces courtes pièces de 5 minutes tout au plus, donnent envie de découvrir plus précisément les destins qui se cachent derrière ces prénoms. On remercie la pianiste Marie Vermeulin pour la délicate interprétation de ces évocations.


Après Nadia Boulanger, on retrouve deux pièces de sa petite sœur disparue plus tôt que de raison : Lili Boulanger. La violoniste Anna Egholm, accompagnée du pianiste Frank Braley, interprète premièrement Nocturne, où le jeu léger et identique du piano permet au violon de s’exprimer pleinement avec de longues notes, jusqu’aux dernières de cette montée finale. Le Cortège est court, moins de deux minutes. Mais alors que la pièce commence par une balade, dirons nous, champêtre, petit à petit les deux musiciens accélèrent, la partie de violon est plus virtuose, ce qui permet de terminer le trajet par deux accords fortissimo.


Nous terminons ce disque avec six pièces pour piano à quatre mains de Mel Bonis. Ces pièces initiatiques permettent aux pianistes de tous niveaux d’en trouver une qui leur convient de jouer. En effet, Mel Bonis balaye tous les styles d’écriture avec Caravane, Andante religioso, Carillon de fête, À matines, Habanera et enfin, Minuit sonne à la grosse horloge. Nous pouvons remercier Roberto Prosseda et Alessandra Ammara, de s’être pliés à cet exercice, leurs jeux ne font alors plus qu’un.


Pauline Beton



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