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Trésors des XXème et XXIème siècle - Florilège

Dernière mise à jour : 15 mai 2022

13 mai 2022

Enfin un album qui mêle intelligemment des mélodies portant sur des femmes, écrites pour des femmes ou composées par des femmes sans tomber dans le cliché ! La soprano germano-chilienne Josefine Göhmann fait dialoguer la Nana de Kurt Weill et la “trunkene Tänzerin” (danseuse ivre) de Hindemith ; la piété du Requiem para un niño de Yoshida à celle de la Vierge de Cluny de Macahis, et nous fait découvrir au passage bon nombre de raretés. Parmi celles-ci, trois perles de compositrices se cachent : d’abord, en ouverture et en clôture du disque, deux pièces contemporaines, et puis un extrait du cycle Clairières dans le ciel de Lili Boulanger, ici transcrit pour soprano. Dans cette mélodie, le piano de Mario Häring, qui fait preuve d’une retenue empreinte de modestie, laisse la voix s’épanouir dans des aigus amples, et dans des médiums délicats et souples. Seul bémol : on ne comprend guère le très beau texte de Francis Jammes, tant le timbre de la voix prend toute la place… Le texte a plus d’importance dans les oeuvres de Feliz Anne Reyes Macahis et de Aya Yoshida (respectivement, La Vierge de Cluny, “Chant d’une femme”, et Réquiem para un niño, “Canción de cuna eterna”) ; mais ce sont surtout les variations dans les effets employés qui impressionnent. La première alterne courtes sections chantées et phrases parlées, transformant peu à peu le texte en simples consonnes, répétées jusqu’à en devenir hypnotisantes. La seconde exige de l’interprète des effets de spatialisation, entre passages murmurés et respirations bruyantes, qui semblent s’éloigner et aigus plus assumés. Josefine Göhmann est particulièrement à l’aise dans ce jeu de rôles permanent, comme dans le reste de cet album d’une admirable audace.


Clara Leonardi

 

Chaque année, le projet mené par les National Youth Choirs of Great Britain permet à 4 compositeurs et compositrices de créer et d’enregistrer des œuvres écrites pour et avec les différents chœurs du programme - dont il faut signaler le talent dans l’interprétation de ce répertoire. De quoi alimenter le répertoire choral contemporain de nouvelles voix ! Cette année, outre les riches explorations sonores des très belles créations de Derri Joseph Lewis et Alex Ho, on a aussi le bonheur de découvrir 2 compositrices. La très poétique pièce The Way Through the Woods d’Anna Disley-Simpson s’ouvre sur des bruits de forêt et d’oiseaux qui se modifient progressivement en une texture très imagée tissée par les différentes voix du chœur. La compositrice mêle les voix avec brio, et crée une atmosphère à la fois émouvante et électrique grâce à son travail sur les différents plans sonores. On découvre aussi February Twilight, plus contemplative et tout aussi réussie, où la recherche se porte davantage sur l’harmonie. Kristina Arakelyan nous présente la poignante I Wandered Lonely as a Cloud, où l’écriture harmonique dense dessine de grandes vagues d’émotion, laissant ressortir quelques accords et mélodies particulièrement touchantes. La première de ses 2 Love Songs « You Are Loved » repose sur les mêmes méthodes, tandis que « My Love is Come to Me » explore de nouvelles atmosphères plus dansantes et populaires.

Marie Humbert

 

Après avoir publié un album conçu autour du thème de la nuit en 2018 intitulé O Mistress Moon, la pianiste Jennifer King revient avec une variation, O Mistress Moon – Canadian Version, se concentrant sur des compositeurs et compositrices contemporain.es et canadien.nes. L’occasion d’entendre entre autres une pièce peu connue de Sophie-Carmen Eckhardt-Gramatté, le nocturne E.93 issu des pièces « From my childhood », aux allures nostalgiques et langoureuses. La compositrice et guitariste Amy Brandon voit ici interprétée « Frost Moon », une œuvre étonnante, qui derrière son ambiance nocturne cache une forme d’agitation troublante et qui a été commandé spécialement par la pianiste Jennifer King en 2021. Elle suit « Gliese 581 c », une courte pièce de Emily Doolittle peignant une impression de l’environnement spatial, donnant une sensation d’apesanteur. Passée maîtresse dans l’art de la musique composée autour du thème de la nuit et de la lune, Jennifer King sait rendre hommage à ces œuvres contemporaines et livre un très beau programme.


Raphaël Godefroid

 

C’est par un « Allegro » initialement bien mélancolique que commence la Sonate pour alto et piano de Marcelle Soulage. Le piano de Wei-Chun Bernadette Lowe pose le décor, puis assume un rôle tout en subtilité dans la partition, entre ponctuation en contre-chant délicat dans l’aigu et foisonnement de notes dans le grave. Malgré quelques difficultés dans les passages les plus virtuoses, Hillary Herndon s’approprie l’œuvre et propose une interprétation passionnée : après les chants du premier mouvement, le « Scherzo » permet à l’altiste d’explorer le timbre plus grinçant et rebondi de son instrument. La « Complainte » du troisième mouvement, qui laisse l’alto presque seul dans une mélodie aux allures improvisées avant de faire dialoguer les deux instruments dans un duo inquiet et tragique, fait place à une « Ronde » enlevée, un brin sarcastique. Finalement, aucun mouvement n’aura échappé à quelques mesures mélancoliques dans cette œuvre écrite par Marcelle Soulage à 25 ans ; la compositrice évolue avec fluidité d’un caractère à un autre, sans qu’on ne perde l’unité de son écriture à la fois touchante et inventive.


Marie Humbert

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